— Fatalité — La notion de fatalité domine l'occultisme dans la mesure où le fait de la divination en pose le principe. On appelle fatalité le fait de ne pas pouvoir échapper à son destin. Or, il est à la fois vrai de dire qu'on n'échappe pas à son destin et qu'on peut échapper à son destin — parce que ce dernier mot n'est pas pris, dans les deux cas, dans le même sens.

Comme nous l'expliquons dans l'article consacré à la notion de destin, il y a un destin primaire, tendant à la réalisation s'il n'y a pas prise de conscience et si, par conséquent, la volonté ne vient pas le modifier. Le destin secondaire est la résultante du destin primaire et des décisions volontaires prises avec intervention de la conscience.

Toutefois, ce destin secondaire, lui non plus, n'est pas inéluctable, car des facteurs d'ordre cosmique (accidentels en apparence et de notre point de vue : déclaration d'une guerre, épidémie de fièvre jaune, etc., etc...) peuvent jouer qui, sans en modifier les grandes lignes, en modifient le résultat concret. Cela posé, la fatalité peut être entendue comme le destin N° 3, qui comporte tout, y compris nos efforts de volonté et les facteurs extra-individuels. A ce destin-là, en effet, personne n'échappe. La fatalité peut être aussi prise dans l'acception de ces seuls événements courants et facteurs cosmiques, déjouant les prévisions de l'individu malgré ses efforts.

Enfin, dans un troisième sens, la fatalité peut être prise comme une acceptation de principe ; c'est à ce sens que s'apparente la notion de fatalisme, telle que les Européens ont coutume de la prêter aux Musulmans. Le fatalisme ainsi compris exclurait tout effort et limiterait donc la destinée de l'homme à son destin N° 1. Il mériterait mieux l'appellation de résignation quasi-pathologique.

II n'est pas superflu de savoir à l'occasion que le fatalisme musulman est un fatalisme en Dieu. Être Musulman — c'est-à-dire mouslim, abandonné — c'est s'abandonner sans réserves aux décrets divins. C'est l'application intégrale du Fiat voluntas tua des chrétiens. Or l'acceptation en Dieu comporte des efforts constants, notamment contre le point de vue égotique. C'est ce qui fait, avec l'impersonnalité de son Dieu, la grandeur de la religion musulmane.