La danse est, par excellence, un instrument d'expression magique. Par surcroît, elle constitue un exercice propre à provoquer la transe. Cette double fonction, oubliée dans les formes classiques et modernes de la danse, transparaît dans nombre de légendes ou pratiques.
Enfin, bien des danses ne sont que des occasions de rondes, c'est-à-dire de manifestations collectives. Les rondes n'en ont pas moins une valeur magique certaine dans quelques cas

La
Ronde des Fées avait lieu dans une clairière (voir au mot Fée), et l'on croyait qu'après leur passage, l'herbe refusait de pousser. C'est le résultat d'une confusion avec les rondes des sorcières qui laissaient l'herbe brûlée. On sait aujourd'hui que ce phénomène est lié à l'existence de certains champignons effectuant leur croissance sous terre en cercles de plus en plus grands. D'ailleurs, les fées n'étaient pas les seules à danser au clair de lune : les Elfes, les Courils, les Willis en faisaient autant et il était de présage fatal de les rencontrer. La Danse du Sabbat était une des parties du rituel du Sabbat.

Les diables et les sorciers y dansaient dos à dos au son d'instruments de musique variés.

Sur un plan plus humain, il faut signaler l'extraordinaire chose que représente la
Danse des Morts, ronde des vivants et des morts, telle qu'elle eut lieu, dit-on, en 1424, à Paris, au cimetière des Innocents. Quant à la Danse de Saint-Guy, on sait médicalement en quoi elle consiste : c'est une affection nerveuse atteignant généralement les adolescents et provoquant des mouvements choréo-athéthosiques.

Cette affection n'a rien de commun avec la
Danse de Saint-Guy épidémique, née en Allemagne vers 1374 après la terrible peste noire et propagée d'un bout à l'autre de l'Europe. Les victimes, hommes et femmes, erraient en bandes en se tenant par la main et sautaient et se convulsionnaient horriblement jusqu'à ce que l'épuisement les jette à terre écumants. Ils avaient des hallucinations, se voyaient submergés dans une mer de sang et croyaient voir apparaître des démons. Les malheureux rentraient en crise dès que se faisait entendre un bruit violent ou dès qu'apparaissait une lumière vive. Exténués par les secousses incessantes, ils demandaient aux personnes présentes de leur serrer le ventre aussi fortement que possible.

Cette transe extraordinaire atteignait souvent les assistants, qui venaient grossir la troupe. Cela rappelle ce qui arrive quelquefois en Afrique du Nord, aux spectateurs admis à voir les danses des
Hissaoua. Il arrive qu'un Arabe — et même parfois un Européen — observant la danse frénétique de ces possédés de Dieu, commence à son tour à danser rythmiquement jusqu'à tomber épuisé, écumant, parfois mortellement atteint par la congestion cérébrale. Il s'agit là d'une tout autre sorte de danse, sacrée celle-là, qui s'exécute au son obsédant d'un ou de plusieurs tambourins.

Les danseurs commencent à suivre calmement le rythme qui s'accélère peu à peu. Le danseur danse en état de transe, s'agite de plus en plus, ploie son corps en deux et le relève à une cadence effarante, cheveux au vent (les femmes dansent aussi), perdant leurs vêtements. Toute sensibilité disparaît et, sans cesser de danser, certains se fendent le cuir chevelu à la hachette ou se lacèrent la peau avec des couteaux, et la danse continue dans le sang qui sourd de toutes parts, jusqu'à ce qu'une crise épileptique jette le danseur au sol, agité et écumant.

Sans aucune comparaison sur le plan mystique, il faut rapprocher des danses des Hisaoua celles qui précèdent nombre de cérémonies rituelles des peuples primitifs. Les reportages cinématographiques nous ont familiarisés avec ces danses étourdissantes poursuivies sous le plein soleil ou à la lumière des torches pendant des heures et des heures. Il faut dire que le rythme a, quelquefois, une valeur magique propre et l'on peut de ce point de vue, rattacher l'action du tam-tam à celui des mantrams. On note, en effet, et cela est relaté de tous côtés, que le tam-tam ou tout autre instrument à percussion manié par un homme connaissant les rythmes propices, réalise sur les moins prévenus un état de transe hypnoïde.

Enfin, du Thibet à l'Amérique centrale en passant par toutes les civilisations primitives du monde, les sorciers se livrent à des danses dont la signification est purement magique, chaque geste ayant une valeur définie et fixe.
Les Peaux-Rouges nous ont conservé les
Danses Rituelles Magiques, d'un symbolisme étonnamment intéressant, et que le danseur Os-Ko-Mon, avant guerre, fit connaître à l'Europe. Cela nous entraînerait, en toute rigueur, à parler aussi des Danses sacrées.

Il est aisé de se documenter désormais sur celles de la Chine, de l'Indochine et du Japon, des Indes et de l'Afrique. Le côté rituel a souvent survécu au côté religieux ; ou bien encore, un contenu religieux en a remplacé un autre, comme cela s'observe dans la danse espagnole ou maintes danses régionales de tous pays. Enfin, il est des danses, et notamment des rondes, attachées à des traditions régionales, dont le sens symbolique est évident (rondes autour du Feu de la Saint-Jean, etc...).