Comme eux, ils étaient dotés, selon certains, d'un corps subtil, qu'on ne pouvait apercevoir que dans certaines circonstances et conditions. Le christianisme, répudiant les Dieux païens, devait logiquement rejeter leurs intermédiaires dans le maudit, où ils ont retrouvé les diables et Satan.

C'est donc assez récemment que le mot démon a pris le sens péjoratif qu'on lui donne aujourd'hui. A l'origine, la mythologie rabbinique explique les choses comme elle le peut, et les Docteurs du Talmud expliquent l'existence des démons de plusieurs façons :

1°) Dieu les créa le même jour où il créa les enfers, mais dut les laisser sans corps faute de temps, car c'était le jour du Sabbat et il ne pouvait pas continuer à travailler sans violer la loi.

2°) Adam n'approcha pas Ève tout de suite ; l'ange Samuel, touché de la beauté de cette dernière, la féconda et elle mit au monde les démons.

3°) Adam, qui était une sorte de scélérat, enfanta les démons — avec plusieurs femmes d'ailleurs (Lilith, Nahama).

4°) Les démons sont des anges déchus par la jalousie de l'homme ; mâles et femelles ils procréent d'autres démons.

5°) Les âmes des damnés peuvent aussi venir sur terre sous forme de démons, etc. Les démons de la mythologie rabbinique ont trois caractères communs avec les anges. Ils ont des ailes, ils volent et ils connaissent l'avenir ; et trois caractères communs avec les hommes : ils sont obligés de manger et boire, ils procréent, ils meurent.

Que les démons aient acquis leur mauvaise réputation depuis l'affirmation du courant judéo-chrétien ne signifie pas que notre civilisation soit la seule à les considérer comme maléfiques : les Moluquois croient que les démons entrent par leur toit la nuit, qu'on les rencontre dehors dès que le jour tombe, et se présentent de toutes sortes de manières.

Les Siamois appellent démons les âmes des criminels, des nouveau-nés, des femmes mortes en couches, de ceux qui sont morts en duel, en un mot, de tous ceux qui se sont rendus indignes des honneurs de la sépulture.

Le symbolisme naturel de la nuit, du danger, du péché, du mal, explique aisément que toutes les mythologies attribuent des caractéristiques correspondantes aux démons. Toutes les fois qu'une civilisation n'est pas axée sur l'idée de péché (cas de la Grèce antique), les démons sont plutôt des
 génies (voir ce mot) et perdent leur caractère essentiellement maléfique. Ce processus laisse penser que, conformément à la psychanalyse contemporaine du folklore et de la mythologie, les démons correspondent à une projection collective. Il n'est pas certain pour autant que cette projection soit purement mentale. Le psychique collectif peut générer des entités plus ou moins concrètes.

Autrement dit, les démons peuvent ou ont pu exister au même titre que les matérialisations ectoplasmiques ou encore au même titre que le corps astral, le corps glorieux, etc... (voir aussi au mot Diable).